Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
lundi 22 juin 2009
Un mauvais fils
1980
Cinéaste: Claude Sautet
Comédiens: Patrick Dewaere - Brigitte Fossey - Jacques Dufilho - Yves Robert - Claire Maurier - André Julien - David Pontremoli -Raouf Ben Yaghlane - Pierre Maguelon - Jean-Claude Bouillaud - Franck-Olivier Bonnet - Dominique Zardi
Je n'ai pas de souvenir de mauvais film concernant Claude Sautet. Avec ce dernier, le cinéaste m'a encore une fois cueilli. J'ai beau retourner le film dans tous les sens, je ne parviens pas à lui trouver de défaut majeur ; il me parait d'un équilibre et d'une justesse dans l'écriture, le rythme et la mise en scène qui ne font qu'accroître la déjà profonde admiration pour ce maître de tendresse et d'humanité. C'est beau. Ce mauvais fils est un bon film, une merveille de cinéma.
Sautet et Biasini en adaptant un roman de Torok s'attachent à filmer un traité sur l'incommunicabilité d'un père et son fils. "Traité", je conçois que le mot est si grossier pour un film aussi délicatement construit, mais il n'empêche... si l'on voulait mettre en image une démonstration sur les peines et douleurs que peut provoquer le manque de communication au sein d'une famille, ce film serait d'une efficacité imparable.
Grâce à son écriture d'abord, le film suit un cours d'une fluidité naturelle qui crée chez le spetateur une attention soutenue et sans douleur. Les scènes et évènements, la progression de chaque personnage, tout s'enchaîne avec cette sorte de grâce que l'on retrouve souvent dans les films de Sautet. Bien sûr, il compte souvent sur les mêmes procédés pour souligner tel ou tel effet (la pluie, le brouhaha des bistrots, la voiture, la musique classique, etc.) mais à chaque fois sa mise en scène parait si simple et efficace que l'on ne peut pas y être insensible. Plaisir renouvellé, définition même de la grâce.
En faisant s'affronter ces deux êtres incapables de mettre des mots sur les maux qu'ils se sont faits ou ceux qu'ils se font encore, c'est une main que leur tend Sautet. Une caresse, un secours.
Ce qui me touche souvent chez Sautet, c'est sa capacité à ne pas enrober son récit d'un pathos aussi théâtral qu'inutile mais également à ne pas laisser suinter l'impression nauséeuse que l'on doit prendre le parti de l'un ou de l'autre. A aucun moment, il ne porte un regard moralisateur sur ses personnages, il se contente de les suivire, de les accompagner. Il les aime. Difficile pour moi de résister à cette démarche d'artiste humaniste sur un objet qu'il a créé et comme par magie qui devient un être vrai, touchant, un être humain. Ca ne manque alors jamais de m'émouvoir. J'aime les cinéastes qui aiment leurs personnages au point de leur donner un poids, une vie, une densité. Phénoménal.
Le cinéma, art du collectif, est tributaire du talent de beaucoup. Notamment des comédiens. Et ici Sautet fait bonne pioche. Patrick Dewaere bénéficie d'une richesse de jeu dont je ne pourrai, je crois, jamais en appréhender toute l'étendue tant le bonhomme cache mal une immense sensibilité. Parfois pourtant dans un éclair, son regard laisse percer une part de vérité, ce n'est pas un regard d'homme mais celui d'un enfant blessé. On reste alors saisi en songeant à tous ces rôiles qu'il a choisi. On peut même se demander si ce n'est pas le contraire... Branlette, me direz-vous? Moui. Probablement. Patrick Dewaere est un comédien si imposant, si impressionnant, dans la cadence de verbe et de geste, dans la force de conviction qu'il met à chaque instant dans une justesse qu'on pense infaillible, que l'on finit par oublier qu'il était acteur et par croire qu'il était réellement ses personnages. Alors forcément, je gamberge un peu. Ce petit enfant qui cherche de l'amour dans le regard de son père, des caresses et des sourires, est incapable de dire "je t'aime, je veux t'accompagner pour être sûr que tu es heureux et que tu m'aimes", cet enfant rencontre un autre amputé de la langue, plus bourru encore, tassé par les ans et surtout l'amertume.
Yves Robert a la bouille de l'emploi, un grand gars massif et rond. Au moment de retrouver son fils, il a l'accolade facile et franche.
Il aime son fils. Mais très vite, le passé, avec ses sentiments et pensées étouffés, non réglés, refait surface progressivement jusqu'à ce qu'un malentendu puis un autre parachèvent la destruction des quelques maigres liens subsistants. Quand les mots sortent, ils sont durs, des armes, ils agressent, ils fusent comme des flècnes et font des dégâts que rien ne semble pouvoir réparer.
Il faut du temps et d'autres aléas de vie, surtout une histoire personnelle enrichissante faite d'affection et d'écoute pour que les fils cassés puissent être à nouveau renoués. C'est pourquoi l'histoire de Duflilho
et Fossey,
en apparence parallèle et secondaire, est finalement d'une importance primordiale permettant de maintenir, de soutenir Dewaere, le mauvais fils, de lui donner la possibilité de comprendre son père. Caresse et soutien encore et toujours.
Un film plein d'humanité, de richesse intime, de chaleur. Un film de Sautet quoi!
Trombi:
Claire Maurier:
Dominique Zardi:
Pierre Maguelon (oui, oui, le Terrasson himself des Brigades du Tigre):
David Pontremoli (mémorable italien dans les bronzés font du ski):
Frank-Olivier Bonnet (que l'on a plus l'habitude de voir dans des petites productions nanaro-franchouillardes):
Raouf Ben Yaghlane:
Jean-Claude Bouillaud:
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