mardi 12 janvier 2010

Persécution

 

2009

Cinéaste: Patrice Chéreau
Comédiens: Romain Duris - Charlotte Gainsbourg - Alex Descas - Jean-Hugues Anglade

Notice de Jack Sullivan
Notice d'Imdb

Vu en salle

Ma connaissance du cinéma de Patrice Chéreau n'est que trop parcellaire, maigrichonne. Je n'ai pas du tout aimé "La reine Margot", n'ai que de très vagues souvenirs de "L'homme blessé" vu il y a plus de 20 ans sans doute, quant à "Intimité" n'en ayant vu que quelques bribes, je me demande même pourquoi j'ose l'évoquer ici. C'est la raison pour laquelle je me considère comme tout neuf, un débutant face à la caméra de Chéreau et j'entrai ainsi dans la salle de l'Utopia St Siméon vierge d'a priori, ravi de l'expérience, d'autant plus que le casting était appétissant, un trio gagnant.

Finalement, de "persécution", de laquelle parlons-nous exactement? Celle d'Anglade qui, en piqué complètement allumé, tombé amoureux sur un simple regard, fait subir à l'objet de sa subite affection? Une obsession que le scénario ne situe pas en son centre mais bien plutôt comme une espèce de déclencheur. Un auxiliaire. Cette histoire d'harcèlement si proche de la folie, n'a en fin de compte qu'une place mineure dans l'histoire générale.

L'axe du film est bien plus dans l'incapacité de Duris à s'auto-analyser, à s'accepter et s'épanouir avec les autres et en premier lieu avec sa compagne. C'est si vrai qu'il s'échine à ne pas construire une véritable relation amoureuse, se collette avec une Charlotte Gainsbourg tout aussi infoutue de bâtir quelque chose de solide et serein.

Elle est son alter-ego, à l'exception près qu'elle est capable de s'accepter telle qu'elle est. Cela ne lui épargne pas pour autant les désagréments inhérents à ce mode de fonctionnement, à cette forme de solitude pas toujours facile à assumer. Duris ne le sait pas, ne le voit pas. S'il y a persécution, c'est bien de celle-là qu'il s'agit, celle qu'il s'auto-inflige en évitant tout le temps, viscéralement, de se regarder dans le miroir. En s'occupant du nombril des autres, le sien reste voilé, inaccessible. Ses jugements moraux à l'emporte-pièce, son souci constant de rechercher et développer une sorte de perfection morale illusoire -excusez le pléonasme- lui permettent de faire l'impasse sur sa propre existence. La perfection n'étant pas de ce monde, il crée ainsi de nombreuses barrières avec sa copine comme avec ses amis, autant d'armures, de carapaces qu'il solidifie à force de jugements, de violences ou d'absences. Duris excelle à faire vivre son personnage pourtant excessif, à tel point que parfois, j'ai eu un peu l'impression qu'il n'était pas réel. A d'autres, au contraire, il lui donne une chair émouvante.

Ce qui aide à entrer dans cette violente mécanique sociale, c'est la très brillante mise en scène de Chéreau.

Le travail photographique (Yves Cape) est souvent remarquable mais le jeu des acteurs respire la justesse et le bon rythme.

Un très bon film qui m'a fait forte impression même si l'émotion, parfois, s'éclipse. Je n'ai pas tout le temps été conquis par l'histoire, mais toujours par la direction d'acteurs.

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