Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
dimanche 23 août 2009
Le temps qu'il reste
2009
Titre original : The time that remains
alias : Le temps qu'il reste
Cinéaste: Elia Suleiman
Comédiens: Ali Suliman - Saleh Bakri - Avi Kleinberger - Menashe Noy - Elia Suleiman
Notice Imdb
Je n'ai pas tout compris mais j'ai pris plaisir à suivre ce singulier spectacle mêlant poésie, mystères et sourires. C'est le premier film de Suleiman que je vois et j'ai été enchanté par l'espèce d'épure dans la mise en scène. Peu de dialogues. Des regards perdus ou chargés d'émotion. Des cadrages savants et simples à la fois. Peu de mouvements de caméra, ce sont les acteurs qui se déplacent dans le cadre. Tout est d'une simplicité formelle enivrante. La photographie est pleine de couleurs adoucies, à la gouache, dans les tons bleus et verts la plupart du temps, un peu gris parfois, un peu jaune aussi. Délicate.
Alors, au sortir de la salle, domina l'impression d'avoir manqué d'outils pour bien comprendre le film, ses ambiguités, ses clins d'oeil, ses sous-entendus. Comme si Suleiman s'adressait à un public plus averti. Et puis, je suppose qu'avec une meilleure connaissance politique, sociale, musicale (la musique joue un des premiers rôles), culturelle de l'histoire d'Israël et de la Palestine, j'aurais eu moins de difficultés à décortiquer les allusions, les ellipses, etc. Peut-être également que Suleiman laisse délibérement quelques trous narratifs pour donner à son film une tonalité évaporée et douce-amère. Le conflit israelo-palestinien, cette déchirure entre les peuples est de toute manière difficile à entendre pour tout le monde, même pour les principaux protagonistes. Et c'est un peu ce que j'en ai retiré, une sorte d'ahurissement du personnage principal, Elia Suleiman lui même, témoin des destinées de sa famille dans le tourbillon de celles de son pays. Incompréhension face à l'absurdité de la violence. La scène du tank ou celles des combats de l'intifada sont éloquentes.
Il est également toujours très agréable de suivre une histoire qui n'est pas perpétuellement béâte face à l'histoire du monde. Ca donne le sentiment flatteur que le cinéaste ne prend pas son public pour un con. Aussi le film évolue-t-il sur diverses tonalités, prenant à son début par exemple des allures presque fantastiques avec cette inquiétante tempête dans laquelle le taxi est pris. Le taxi est occupé par un personnage bien mystérieux, dans l'ombre. On bascule soudain dans une autre époque, la naissance d'Israël, les premiers faits de résistance de Fouad (Saleh Bakri), le père de Suleiman.
A partir de ce moment, la gravité et l'intensité de la guerre l'emportent. Suleiman essaie d'instiller un peu d'humour, en obligeant un soldat israélien de petite taille à monter sur une pierre pour bander les yeux de Fouad. Mais aussitôt la violence reprend le dessus. Au fur et à mesure que les personnages deviennent familiers, l'humour revient progressivement sur le devant de la scène, sans qu'il soit question d'éluder la violence de la réalité, prête à réinvestir le champ d'action. Entre tragédie et humour, c'est tout de même l'humour qui prédomine, comme une bouée de sauvetage, un indispensable point d'ancrage. Mais la poésie s'invite régulièrement dans la farandole grâce à la tendresse et l'amour qui lient les membres de cette famille (au sens large du terme manifestement : un flic ainsi qu'une japonaise viennent aider la mère sur la dernière partie du film). Quelques fois, j'ai pu avoir le sentiment de suivre des saynètes à l'intérieur du récit général (la chorale, le tank, les voisins, la boite de nuit, les urgences, etc) mais ces petits instants volés à la complexité de l'histoire familiale sont très bien intégrés, comme des cartes postales dans un album de famille. Les scènes maitresses sont pour moi l'interrogatoire dans le champs d'oliviers, intense et dramatique ; la mort du père d'une grâce exceptionnelle ; la scène musicale sur le balcon quand Suleiman essaie de stimuler sa mère et la scène où il découvre la photographie de son père dans les mains de sa mère, sur son lit d'hôpital où elle décide d'en finir, très forte émotionnellement bien sûr mais filmée avec un tact inoui.
Voilà, je n'ai pas tout compris, mais j'ai beaucoup aimé la délicatesse de la réalisation, de l'image et la sérénité de la narration. Un film que je reverrai volontiers. Une invitation à continuer de découvrir ce cinéaste.
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