Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
vendredi 31 décembre 2010
Le parrain
1972
Titre original : The godfather
alias : Le parrain
Cinéaste: Francis Ford Coppola
Comédiens: Al Pacino - Marlon Brando - James Caan - Robert Duvall
Notice Imdb
Vu en blu-ray
"Le parrain" en blu-ray "Paramount", mes aïeux, ça vaut son pesant de cacahuètes! Souvent l'enthousiasme chez moi se manifeste par des envolées grasses et vulgaires. J'espère que vous ne m'en voudrez pas trop mais malheureusement cette revoyure ne déroge pas à la règle. Donc, on mouille souvent l'abri-bite pendant ce film, tant il regorge de superbes séquences. La photographie cuivrée de Gordon Willis et les magnifiques cadrages respectent à merveille un récit grandiose.
L'histoire de cette famille est d'abord l'illustration parfois tragique du legs, de ces liens familiaux invisibles que les êtres inconsciemment se nouent autour du cou et de la destinée, cette espèce de reproduction obligatoire. Pourquoi certains en ré-échappent et d'autres non? Refusant dans un premier temps de devenir son père, Mike (Al Pacino) est attiré malgré lui vers la fonction patriarcale et le pouvoir de chef du clan. Coppola adapte avec maestria le roman de Puzo.
Les 3 heures que dure le film passent avec une aisance incroyable, dans un élan d'une grande fluidité. Pas le temps de s'ennuyer. Aucune scène, aucune seconde n'est là par hasard. Elles font sens, en petites pierres construisent un mur massif, solide, inattaquable. Assumant avec brio cette érection, la mise en scène est millimétrée, exprimant avec une facilité déconcertante une multitude de sentiments, d'émotions, de pensées. Sans le moindre discours parlé, les images suffisent amplement. C'est à ces scènes anthologiques qu'on reconnait au cinéma toute sa puissance.
La mort, la vengeance, l'héritage, la jalousie, la peur, l'appartenance au groupe, l'identité sont traités avec la véhémence des sentiments, la violence du monde des affaires, les questions d'honneur, les réseaux assermentés, les trahisons, les pertes, les conquêtes, tous ces thèmes se croisent, s'emmêlent, se déchirent tour à tour et dessinent une superbe fresque épique que les deux prochains volets à voir promettent de rendre encore plus grandiose.
De la foisonnante distribution, je retiens avant tout Al Pacino, qui avec une maîtrise étonnante pour son jeune âge parvient à rendre compte de la très lente maturation de son personnage. En trois temps, trois espaces, il passe du petit jeunot de la famille, un peu en marge des affaires et de la violence, au successeur, le nouveau parrain, assumant tous les mensonges, toutes les hypocrisies de la tâche, arborant la parure du pieux catholique et respectable père de famille. Entre temps, il passera deux Rubicon, le sacrifice et l'exil, avec un retour aux sources, dans le petit village de Corléone en Sicile et une nouvelle rupture, le deuil, un second mariage ouvrant la voie au nouveau "parrain". Autant dire que passer d'un caractère assez effacé à quelqu'un d'aussi déterminé n'était pas une mince affaire. Pacino se révèle plus qu'épatant, il entre dans la complexité du personnage en faisant preuve à la fin d'un naturel confondant de vérité et également d'une tessiture extrêmement riche. Ce type-là est monumental. Respect.
Je préfère, et de loin, le Marlon Brando des années précédentes, plus naturel. Le blu-ray est impitoyable, tellement bien fait que le maquillage de l'acteur est par trop visible. Certes, il joue bien le saligaud, mais son grimage fragilise sa performance. C'est d'autant plus navrant qu'il a le talent de jouer plus simplement.
Dans les nombreux petits rôles que j'avais oubliés depuis la vingtaine d'années que je n'avais pas vu le film, il y a une Diane Keaton peu commune, dans un rôle qui l'éloigne considérablement des personnages enjoués et extravertis auxquels ses collaborations avec Allen nous ont habitué. C'est une agréable surprise de la voir ainsi étoffer sa gamme de talents. Plus grosse fut la surprise de découvrir Franco Citti, comédien pasolinien par excellence, dans un tout petit rôle de garde du corps en Sicile.
Ce serait commettre un crime que de ne pas évoquer la trame musicale de Nino Rota. Le compositeur de Fellini livre encore une fois une partition qui tient de la magie pure. Je ne cesserais d'être abasourdi par la capacité de ces génies à inventer. Celui-là crée une musique d'aspect simple et qui vous fouille néanmoins le ventre.
Au final, Francis Ford Coppola livre un spectacle si intense que le film va servir de modèle au film de mafia, aux grandes fresques familiales, aux films de gangsters en mode tribal.
PS. Lors de cette revoyure je n'ai pas pu m'empêcher de me demander (foutue pensée parasite!) comment Alexandre Arcady avait pu oser faire un film comme "Le grand pardon" en grande partie ersatz de ce "Parrain".
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire