Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
samedi 2 mai 2009
Bad Girls Go to Hell
1965
Cinéaste : Doris Wishman
Comédiens : George La Rocque - Harold Key - Darlene Bennett - Gigi Darlene
Vu en dvd
Enfin! J'ai vu un film de Doris Wishman! Depuis que j'ai vu "Schlock! The Secret History of American Movie", un documentaire de Ray Greene, j'étais intrigué par ce petit bout de vieille bonne femme qui s'est forgé une filmographie impressionnante dans le Z plutôt salace. C'est surtout sa faconde libertaire, culottée, assumée, altière et intelligente qui m'avait, sinon séduit, au moins intéressé. Je voulais voir un film de cette sorte de féministe qui avait filmé des nudies et autres petites productions où les formes féminines étaient dévoilées pour des raisons mercantiles (le marché mâle et kleenex). Il y a là une incompatibilité chiffonnante.
Je tombe sur ce Bad girls go hell au titre si prometteur. Un peu plus d'une heure qui ne passe pas très vite cependant. Je pense que si l'on était allé à l'essentiel du primordial, le film aurait pu durer 35 à 45 min. De longues séquences descriptives filment les gratte-ciels, les parcs et jardins, les pigeons sur la pelouse, les canards dans l'étang, les pas des passants dans la rue, etc. On pourrait renverser la critique en un argument de poids : on est tout de suite étonné par la richesse et la variété des cadrages et le montage par moments assez vif (dans les scènes d'action). Les plans ne sont pas toujours longs, mais quelques fois répétitifs. Très vite aussi on repère des plans d'ancrage je dirais, par exemple ces fameux plans des jambes des personnages, dans la rue comme dans les appartements.
Et puis évidemment, sans réelle justification, l'œil du spectateur est abreuvé de jeunes femmes en déshabillés, soutifs et petites culottes. Point de tétons, ni de poils pubiens à l'horizon. A peine quelques images de culs et de dos dénudés.
C'est sur ce point finalement que l'on se rend compte que Doris Wishman ne fait pas vraiment un film érotique dans le sens masculin du terme. Difficile pour moi de faire de grandes théories sur le vu d'un seul film, mais disons que je me permets de supputer, de dégager des hypothèses de mes premières impressions et que de prochains visionnages viendront corroborer ou infirmer.
Alors n'omettons pas le crucial "peut-être". Peut-être la cinéaste privilégie-t-elle un érotisme sur les relations entre hommes et femmes? J'entends bien entendu par là que les relations émotionnelles sont prioritairement dessinées, que les relations corporelles sont assujetties à des liens plus profonds et plus intenses. Or, ici ces liens sont souvent tissés sur des rapports de violence. Les rapports normaux, tournés vers l'affection (entre Helen et Della) ou l'amour (Helen et son mari), sont désagrégés par la violence des mâles. Helen, toujours à la recherche de la douceur du foyer américain, de la fameuse american way of life avec sa paix et son confort, utopie hypocrite, est une Justine assaillie par la lubricité des hommes, violée, battue, ballottée par un réel aussi abject qu'excitant (la fin me fait noter cela). C'est peut-être la morale de Wishman : "le monde érotique des mâles est violent et j'aime ça", credo destiné à mieux l'apprivoiser. Morale à deux balles que j'espère pouvoir préciser avec d'autres de ses œuvres. D'ailleurs il se pourrait très bien que le cinéma de Wishman apparaisse comme un dézingueur du cinéma érotique, une sorte de contre-ciné-érotique. Autre réflexion à deux balles. Parce qu'à bien y réfléchir, sur ce film-là, on pourrait tout aussi bien décréter que ce n'est pas un film érotique, mais un film noir, critique acerbe de la société américaine des années 60. Fichtre, je me serais allègrement branler la cervelle sur ce film-là. Ne me prenez pas trop au sérieux, je vous en conjure. Moi même je pose sur cette critique un regard des plus perplexes, mais également des plus indulgents.
En tout cas, il faut noter également que l'esthétique du film n'est pas dégueulasse, du tout. Très marquée par son époque, elle m'a fait penser à plusieurs reprises à Psychose, à Carnival of Souls, et un peu aussi à John Waters.
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