dimanche 5 juin 2011

Les femmes du 6e étage



2011
alias : Les femmes du 6e étage
alias : Les femmes du sixième étage

Cinéaste: Philippe Le Guay
Comédiens: Fabrice Luchini -Sandrine Kiberlain -Carmen Maura -Lola Dueñas

Notice Imdb

Vu en salle



Je suis allé voir ce film sans trop rien savoir, si ce n'est qu'un grand bourgeois, chassé par sa femme qui croit avoir été trompée, se retrouve à vivre dans les combles, parmi les bonnes au 6e étage de son immeuble, sans savoir non plus s'il s'agissait d'une comédie burlesque, de mœurs, une histoire romantique, un drame ou une satire politique.
J'y suis allé parce que Fabrice Luchini est un artiste qui me plait énormément. Il est d'une richesse telle qu'aller voir un de ses films réserve toujours une surprise, malgré l'image médiatique que le comédien trimballe (un peu moins de nos jours) avec lui de façon plus ou moins volontaire et consciente.
Il convient de faire la part des choses entre les numéros de clown que la promotion de ses films l'ont incité à proposer à la télévision et l'incarnation de ses personnages au cinéma. Aussi loin qu'il m'en souvienne, je n'ai jamais été déçu par ce que le comédien a présenté sur grand écran. Il a toujours su insuffler à ses rôles des tonalités étonnantes, souvent pleines d'émotions et de sentiments rentrés qui jaillissent avec plus ou moins d'éclat.

Fabrice Luchini campe souvent le même personnage, celui d'un bourgeois un peu effacé, dont les colères éclairent le quotidien de notes épicées, mais comme souvent chez les très grands comédiens, il tire de ses caractéristiques, de son talent une variété de tons ou de couleurs qui, de film en film, élabore une mosaïque riche et complexe d'âmes fouillées et denses, d'une rare beauté poétique. Fabrice Luchini est un très grand acteur. J'ai beaucoup d'admiration pour ce type.
D'autant plus qu'il se dégage de son travail, de son expression, une sorte d'amour de jeu, du texte, un plaisir hédoniste volontiers partageur, une offrande jamais narcissique. Ce gars-là mon vieux, il est terriblement généreux. C'est bon.
Je comprends que d'aucuns ne le supportent pas. Les traits sont saillants, la diction "Jouvet" peut en rebuter plus d'un. Mais c'est juste dommage pour eux, ils passent à côté d'un travail formidable.

J'ai été tout de suite charmé par la douce quiétude qui se dégage de ce film et par ces petits piaillements des bonnes espagnoles. La rondeur élégante et chantante de leur langue réchauffe une photographie plutôt froide, dans des verts et des bleus que le grand appartement parisien impose à tout le monde.
Je ne connais pas Philippe Le Guay, même si le nom me dit quelque chose. Je n'ai surtout pas la moindre idée de ses intentions. Mais au delà du code romantique (j'ai longtemps cru à une fable sociale) que le récit suit sagement, il est apparu très clairement que le film était avant tout une ode amoureuse, un poème dédié à l'Espagne. Par le biais de ces femmes, le cinéaste a sans doute voulu que le public s'identifie au personnage de Luchini et tombe amoureux, comme lui, de ces bonnes espagnoles, de leur courage, de leurs sourires, de leur joie et de leurs peines.
En ce qui me concerne, j'ai parfaitement marché et ai pu ainsi "comprendre" que le grand bourgeois tombe réellement amoureux de Maria (Natalia Verbeke).
Même si l'on pouvait craindre que cela ne soit qu'une bouffée de désir née de sa position de patron pour la subalterne, peu à peu la sincérité de sentiments se révèle toute puissante et tout rafraichissante. C'est l'essence même du film qui s'exprime là, dans cette renaissance, ce magnifique accord quand on est amoureux entre tous les sens de la vie.
Ce qui frappe également c'est la simplicité avec laquelle Le Guay film son histoire. Aucun effet de caméra, une photographie discrète, une mise en scène épurée, un scénario sans grande surprise au fond, un chemin plutôt tranquille dans le récit sauf sur la fin, avec toutefois quelques montées de lait, de violentes émotions qui n'en sont que plus touchantes, plus courtes qu'inattendues d'ailleurs.
On ne s'appesantit pas vraiment. Le pathos est une virgule rare ici, consommée avec parcimonie.
Les gros plans mettent à nu les personnages, en disent tellement long mais toujours à bon escient. Bref, j'ai trouvé le travail de mise en scène remarquable de simplicité. Sans esbroufe, élégant et efficace.

La portée du film se limite donc à ça : une histoire simple, délicatement exposée. Un petit film charmant.

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