Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
vendredi 21 avril 2017
Le pion
1978
Titre original: Le pion
Cinéaste: Christian Gion
Comédiens: Henri Guybet - Claude Jade - Maureen Kerwin - Claude Piéplu - Michel Galabru
Notice SC
Notice Imdb
Vu en avi
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Parmi les films de Gion, celui-là me plait beaucoup malgré une certaine propension ici à la pochade scolaire comme les années 70/80 ont tant aimé à en produire. Le sous-genre “film de cancres” a fait florès, pas uniquement en Europe, mais dans le monde entier. En France, Les sous-doués ou Les diplômés du dernier rang dans les années 80 sont venus couronner de leur image festive un cinéma populaire lu par ailleurs comme celui d’une production plutôt facile, souvent fauchée, complètement affidée au cinéma bis.
De cette tendance dévalorisante, Christian Gion semble en accepter le postulat : en effet, de nombreux gags ponctuent l’histoire sans doute au départ de façon à justifier, à souligner par contraste, le caractère “revanchard” du petit pion face à sa hiérarchie et à l’intelligentsia locale (ou ce qui fait figure, celle qui “voudrait” avoir l’air, mais qui n’a pas l’air du tout). C’est la thématique majeure, l’axe du cinéma de Christian Gion : un individu en butte au mépris de classe que lui renvoie une société. Ici ce sont ses supérieurs hiérarchiques et la notabilité locale qui n’ont pas l’intelligence d’apprécier la sienne. Ailleurs, par exemple dans Le provincial, c’est le snobisme parisien. Dans C’est dur pour tout le monde, Francis Perrin se voyait déjà contraint à lutter face aux nantis (Bernard Blier) pour exister, pour prouver son talent et asseoir ses propres valeurs face à la tradition jugée obsolète.
Dans Le pion, c’est avec un peu plus de subtilité que ce même discours est proposé. Par rapport à la tradition incarnée par le vieil écrivain joué par Claude Dauphin,
le jeune pion (Henri Guybet) voue un grand respect, de l’admiration. Par contre, quand il s’agit de l’institution, que ce soit celle du lycée dans lequel il travaille en sous-fifre parce que non titularisé, ou que ce soit celle de l’Académie des Belles Lettres dans laquelle il souffre également d’un même mépris subalterne, la tradition, le lien vers le passé est lu plutôt comme un archaïsme paralysant, en plus d’être malhonnête, injustifiable. Le prix Goncourt offre en réponse comme une rupture, un moyen de casser le jugement établi.
De même en filigrane, le duel amoureux qui se joue entre la douce et jolie Claude Jade
et la sublime mais très sophistiquée Maureen Kerwin
prolonge cette distinction entre la simplicité des uns et le maniérisme des autres. On pourrait trouver que cela manque de subtilité. Les mécanismes sont très simples, peut-être même peuvent sembler simplistes, et il serait difficile de le contredire. Mais j’ai bien envie de mettre en avant la vision de l’ensemble, le résultat final : l’impression bien marquée d’un conte moral peut-être un peu naïvement angélique, doucement révolté certes, mais fondamentalement bienveillant. Écrit et filmé avec un certain sens poétique, Le pion est délicat, porte un regard attendrissant sur les personnages, mêmes les plus palots a priori (comme celui de Claude Piéplu,
à la fin racontant avec émotion des souvenirs de pêche à l’écrevisse dans sa jeunesse). Le regard du héros (Henri Guybet) est celui de Christian Gion. C’est évident. Et ce regard est foncièrement généreux, plein d’indulgence, de patience pour les gamineries de ses élèves, en dépit du fait qu’il en est le jouet pendant un long moment.
Le rythme du film, par le montage, par la façon dont les acteurs prennent leur temps (à commencer par Henri Guybet
qu’on a rarement vu adopter un jeu aussi sobre, très éloigné de ses rôles habituels), le rythme donc se veut très serein, contemplatif presque.
La musique de Beethoven très présente n’est pas qu’un baume apaisant. Elle est davantage un compagnon de route pour le pion. J’imagine bien que cette petite musique incarne même la personnalité, si ce n’est l’âme de cet homme discret, essayant de vivre sa passion pour la littérature, malgré la violence sociale qu’il vit.
Les films de Christian Gion sont souvent des films de révolte sans violence contre celle de la société. Cela peut apparaître comme systématique, voire systémique en l’occurrence, mais peu importe, cela fonctionne. Certes, il s’appuie sur certaines grosses ficelles, comme ici le film de cancres, mais peut-être n’a-t-il pas eu le choix? Je ne connais pas Christian Gion, ni les moyens, ni les ambitions de cette production, il ne s’agit là que d’un avis personnel. Toujours est-il que j'ai pris plaisir à suivre cette production sans prétention.
Trombi:
Michel Galabru:
Matthieu Vermersch:
Bernard Musson:
Stéphane Lievain et Martine Laruche:
Roland Giraud:
Denise Glaser:
Dominique Vallée:
Raymond Colom: (droite)
François Guétary:
Christophe Guybet (grande perche à lunettes, tall guy with glasses):
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