mercredi 28 septembre 2011

La planète des singes




1968

Titre original : Planet of the apes
Alias: La planète des singes
Alias: Monkey Planet


Cinéaste:Franklin J. Schaffner
Comédiens
:
Charlton Heston -Roddy McDowall - Kim Hunter -Maurice Evans


Notice Imdb
Vu en blu ray

J'adore ce film. Peut-être pas autant que le roman de Pierre Boulle, tellement plus réaliste. Il faut d'ailleurs véritablement séparer l'œuvre originale et son adaptation cinématographique. Elles ne veulent absolument pas dire la même chose.
Parlons du film et de la façon dont il s'imbrique parfaitement dans son contexte historique, culturel, social et politique, c'est là l'une de ses saveurs les plus relevées. A l'heure où Kubrick érige son autel métaphysique intersidéral, la Century Fox ose le pari fou de grimer des acteurs en singes et de bâtir une planète où ils règnent en maitres despotes.
Je ne connais pas encore l'histoire de cette production (Qui en est le véritable maître d'œuvre? Qui en a échafaudé l'adaptation?) mais toujours est-il que très vite des thématiques politiques se font jour de manière particulièrement évidente.
Il ne faut pas être grand clerc pour relever dans cette histoire la tournure anti-raciste manifeste. L'époque est à la revendication, aux réveils humanistes et progressistes. L'allégorie est un peu lourde, certes, assenée à gros traits simiesques, mais il n'empêche qu'elle a le mérite d'exister et de démontrer par l'absurde tout le grotesque de l'intolérance raciale et surtout comment elle se construit sur une émotion primaire que l'on peut combattre, la peur.
Le corollaire sur l'obscurantisme religieux est peut-être amené avec autant de force, mais porte finalement bien davantage.
Quand on sait combien les thèses darwinistes sont encore de nos jours contestées par des imbéciles intégristes, ce film est une jolie illustration de la façon dont la peur de l'inconnu immobilise les consciences et empêche la société de grandir. Le Dr Zaïus (Maurice Evans)
en bon hypocrite pété de trouille est la malhonnêteté incarnée, l'inquisiteur borné, le portrait fidèle du fanatique religieux obnubilé par son pouvoir spirituel au détriment de la raison pour tous.
A cela s'ajoute le contexte de guerre froide et la menace atomique réelle qui pèse sur la tête du public américain. C'est sans doute cette angoisse pacifiste qui a prévalu dans le virage en aiguille que prend cette adaptation, très éloignée du roman initial. Je ne risque guère le spoiler tant le film est archi connu mais cette image de la statue de la liberté en ruine sur une plage est un grand moment de cinéma, amené avec un timing parfaitement maîtrisé.
Il faut noter que Jerry Goldsmith pèse de tout son poids sur ce film avec une œuvre musicale qui fait bien plus qu'accompagner, mais hausse la tension dramatique du film tout le long du récit. J'adore à tel point cette bande originale que je vous conseille de faire l'acquisition de l'album trouvable sur la toile. A base essentiellement de percussions, l'instrumentalisation se donne des airs de grossièreté naturelle (une musique bio?), de brutalité inquiétante. Elle se marie tellement bien avec l'aridité du désert ou les paysages méditerranéens de ce qui ressemble fort à la Californie. Goldsmith écrit une partition frissonnante, étouffante. La présence animale et belliqueuse des singes imprègne la bande son, oppressante, et paradoxalement le compositeur parvient à créer une très belle œuvre, qui s'écoute avec un grand plaisir. Elle parle autant qu'elle caresse ou hurle. Fascinante. Mystérieuse. Elle désoriente les personnages perturbés par ce monde à l'envers. Complexe phénomène que la création artistique, surtout pour moi quand il s'agit de musique, cela reste une énigme supplémentaire qui pimente avec majesté et élégance le film.
Dans la distribution se détachent peu de comédiens finalement. Kim Hunter et Charlton Heston sont formidables mais il est vrai qu'ils bénéficient des meilleurs rôles. Excellent de cynisme et d'arrogance, la recherche quasi métaphysique et utopiste de Taylor (Heston)
cadre incroyablement mal avec la personnalité comme le parcours humain et politique d'un membre actif de la très réactionnaire et ras du bulbe NRA. Cet homme est un paradoxe sur pattes.
Kim Hunter que je ne connais pas beaucoup (à part sa très belle composition de Stella!!!!!!! dans "Un tramway nommé Désir" de Kazan) réussit la gageure de donner beaucoup de vie et d'intensité à sa guenon, malgré l'approximative tenue des maquillages.
Ah, restons magnanimes, on est tout de même en 1968. A ce propos, si l'on doit dénigrer quelque peu la relative médiocrité du blu ray -merde, je m'attendais à mieux, à plus de détails et de couleurs éclatantes- on ne pourra toutefois pas nier que cette technologie est sans pitié avec les effets spéciaux de l'époque, notamment les maquillages. Passe encore pour les personnages principaux, mais pour les figurants, le fait qu'on leur ait juste mis un masque sur la trogne, vite fait mal fait, apparait de manière trop évidente sur beaucoup de plans.
Oh cette réalité n'est pas aussi triste qu'elle en a l'air : encore une fois, le privilège de l'âge permet au film de garder une certain saveur, celle du charme des vieux objets fabriqué à la main. Ce n'est pas pour me déplaire. Bien au contraire, c'est assez amusant à regarder. J'ai vraiment eu autant de plaisir à revoir le film pour la 20e fois que pour la 1ère. Cela marche toujours très bien.
Je me suis fait cette réflexion en réalisant à quel point les scènes d'introduction par exemple
sont bien ficelées, combien le tempo est maitrisé à merveille, avec un crescendo dans le mystère qui me surprend à chaque reprise. Et le final fait montre de la même ampleur, d'un grandiose qui ne se dément pas, toujours renouvelé. C'est véritablement un spectacle succulent.

Mini trombi:Roddy McDowall:

Linda Harrison:

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