jeudi 8 octobre 2009

Bob le flambeur




alias : Bob the Gambler
alias : Fever Heat
1956

Cinéaste: Jean-Pierre Melville
Comédiens : Isabelle Corey - Roger Duchesne - André Garet - Daniel Cauchy

Notice Imdb

Vu en dvd



Le Breton et Melville ont sans doute dessiné un personnage mythique, haut en couleurs, un enfant au-dessus des hommes. Avec sa blondeur platinée et toujours impeccablement lisse de gomina, Bob (Roger Duchesne) a tout d'un ange, maudit, cela va de soi, qui se brûle les doigts et les ailes dans les bouges ou les casinos. Gueule en acier, mâchoires serrées, yeux d'un bleu métallique et face immaculée ont de quoi mettre les foies à n'importe qui. Le marlou Marc ne moufle guère quand Bob s'énerve. A se demander si ces messieurs n'ont pas voulu évoquer avec ce froid faciès la figure emblématique du Dr Mabuse made in Rudolf Klein-Rogge.

Les prises de vue obliques, en plongée ou contre-plongée, donnent à l'action et aux personnages des airs de bande-dessinée mouvementée dans lesquelles les héros au grand cœur sauvent les innocentes jeunes fille en détresse. Ici, on évolue plutôt dans le noir, mais Bob a la générosité tout aussi ample. Il ne supporte pas les maquereaux, a pris sous son aile un freluquet un peu naïf et se prend d'affection paternaliste pour une jeune femme à la cuisse légère, au plus offrant. Comme on est dans le noir, les histoires de casse finissent évidemment mal. L'ironie du sort s'acharne et prend un malin plaisir à jouer des tours à ce joueur invétéré. Bob flambe au mauvais moment.

Melville dépeint parfaitement la population interlope du Pigalle des années 50, c'est à dire un univers qui commence de s'écrouler, éteint aujourd'hui, un monde sans came où les loulous ont un code d'honneur. Tout en flirtant délibérément avec les codes cinématographiques des polars noirs américains, Melville assure une réalisation très vive et d'une belle richesse avec une très grande variété de cadrages. La photographie d'Henri Decaë est souvent belle, parfois plus encore. Autrement dit, c'est bien foutu.
La post-synchronisation pas toujours correctement ajustée m'a un peu gêné. J'ai toujours du mal avec ce procédé. La distribution souffre un peu de ce décalage sonore. On se retrouve avec les mêmes soucis de vérité dans l'intonation et d'authenticité dans le ressenti que sur les films étrangers doublés. M'enfin, c'est anecdotique et sensible qu'à de rares reprises. Il n'échappera cependant à personne que le bât blesse sur quelques acteurs. Daniel Cauchy surtout, dont la fraîcheur n'est pas à négliger, mais qui est tout de même plutôt limité, voire mauvais (la fin).

Les deux vieux, Roger Duchesne et André Garet, ont des jeux très secs, ce qui se révèle d'une part fondamental pour leurs personnages et d'autre part pour toute l'atmosphère noire que réussissent à créer Decaë, Melville et Le Breton. Les deux personnages sont peu de choses près des taiseux, qui parlent vite et bien, sans faire de longs discours, avec un débit rapide, à la mitraillette, tout à fait dans le style que Melville appliquera avec d'avantage encore de puissance, grâce au système de communication le plus austère qui soit : le silence.

L'essence du flambeur : la fuite. Ici, l'on a droit à une courte mais intense séquence. Bob se retourne vers un passé qui lui fait peur, son enfance pauvre et solitaire.

Film noir démontrant que Melville est un cinéaste prometteur, pas encore totalement maître de son art et de sa mythologie.

Trombi:
Simone Paris:

Isabelle Corey:

Claude Cerval:

René Havard:

Guy Decomble:

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