mercredi 31 décembre 2014

Rashômon



1950

Titre original: Rashômon

Cinéaste: Akira Kurosawa
Comédiens: Toshirô Mifune - Machiko Kyô - Takashi Shimura

Notice SC
Notice Imdb

Vu en blu-ray



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Il fait un peu froid dehors, mi-décembre, le grand écran délivre une image superbe. Le canapé a été déplié. Les coussins sont aussi moelleux que chauds et la petite couverture finit d'instaurer un climat propice à siroter la beauté d'un Blu-ray signé monsieur Criterion. Attention, grand spectacle en perspective : maître Kurosawa convoque les mânes du théâtre et de la mythologie.

D'entrée de jeu, la pluie diluvienne essore le décor, de vieux bâtiments délabrés par une guerre et les détails visuels, la richesse qu'offre l'inventivité du cinéaste éclaboussent l'écran. C'est somptueux. C'est le cinéma dans toute sa splendeur ; elle ne se dément jamais.

L'écriture d'un scénario intelligent, un Toshirô Mifune extra-ordinaire, une mise en image grandiose et voici la trilogie gagnante de Rashômon. Les deux premiers sont intimement liés, évidemment.

Cette histoire racontée à trois voix n'est pas seulement ingénieuse : elle fait l'essence ainsi que le suspense du film. Qui faut-il croire? Où est la juste vérité ? Si jamais tous mentent, comment croire en l'humanité ? Sommes-nous tous pourris, corruptibles? Portons-nous une part d'immoralité intrinsèque, consubstantielle, indélébile ? Ces questions ne sont pas posées de manière abrupte mais découlent comme il se doit d'une logique imparable. Le scénario si intelligent qu'il en paraît lumineux est tout d'un bloc évident. C'est naturellement que la réflexion s'impose au spectateur.

D'autant plus que la nature environnante et le caractère "physique", charnel des personnages sont mis en avant pour souligner les enjeux intérieurs qui sont éprouvés par eux. La mise en scène de Kurosawa n'a rien d'évanescente. Elle propose des personnages, une action, un cadre très vivants. La réflexion sur l'animalité, la violence de l'humanité n'est en rien un jeu philosophique, un jeu de la pensée. Au contraire, cette pensée est incarnée, subit la contrainte des corps. La peur, la souffrance, le désir influencent le comportement, les sentiments et jusqu'à la moralité des personnages.

Avec un élément déclencheur ô combien charnel : le brigand Toshirô Mifune est la bête, humaine par dessus tout, paradoxale, un être fruste, désinhibé par sa force, qui désire et obtient ce qu'il veut, s'en réjouit, peu importe les conséquences, les punitions sociales. Il a décidé que sa marginalité lui donnait toute licence. Il est pleinement l'immoralité faite corps, assumée. Et Kurosawa le filme de façon à le montrer le plus effronté possible, le plus sensuel possible. Tout à son aise, transpirant, presque nu, il y a un plan au début du film où il semble tout droit sorti d'une éprouvante baise. Adossé à un arbre, la lumière du soleil joue entre les feuilles des hautes futaies et le brigand se réveille tel un monstre de lubricité antique. Oui voilà, le brigand est un satyre! Rien n'est dit, tout est suggéré par la brillance de la mise en scène. Génial.

Tout comme avec la pluie au tout début, le film raconte la fin du monde et pose les questions que ces périodes eschatologiques engendrent chez les hommes.

Avec le double, voire le triple langage que les divers témoignages livrent d'un même événement, le récit narre la complexité de définir la vérité, l'absolue, celle que tout le monde appelle de ses vœux, mais qui semble très souvent échapper à la connaissance, tant les interprétations et les mensonges viennent en détourner ou détruire l'accès.

Film profond autant qu'esthétique, admirable, Rashômon est un des Kurosawa que je préfère.

Mini trombi:
Machiko Kyô

Takashi Shimura:

Daisuke Katô:

samedi 27 décembre 2014

Sin City : J'ai tué pour elle



2014

Title: Sin City : A dame to kill for
Titre: J'ai tué pour elle

Cinéastes: Frank Miller - Robert Rodriguez
Comédiens: Mickey Rourke - Jessica Alba - Josh Brolin - Joseph Gordon-Levitt - Bruce Willis - Eva Green

Notice SC
Notice Imdb

Vu en dvd




Graphiquement très joli, je n'ai pas pu résister à un certain ennui envahissant. Voilà qui résume parfaitement mon sentiment à la fin du film.

Visuellement, le travail numérique remarquable donne quelque chose de très beau, très lisse. Et même temps, il y a là beaucoup d'astuce pour faire correspondre cette esthétique bédéisante et quelque peu maniérée dans une mise en scène ultra noire, en tout cas qui emprunte énormément, au delà du titre, à ce genre mythique.

J'ai bien aimé la grande liberté avec laquelle Rodriguez et Miller ont su intégrer les moyens qui leur étaient alloués pour proposer une narration audacieuse, fort innovante. Un plan-séquence comme celui où une poursuite en voiture miniaturisée fait le tour d'un personnage m'a bien plu, par exemple. La force d'invention de ce film est sur le plan formel à saluer.

Malheureusement, le fond ne suit pas. Dieu sait si j'adore le "noir", ce genre indémodable, dans lequel le suintant de l'humanité vient toujours caresser les espoirs déçus avec une poésie métallique, avec un petit goût de sang bienvenu. Mais ici, pitié, un peu d'imagination, s'il vous plaît ! On est tellement dans l'archétype corseté qu'on s'ennuie très vite. Les émotions se voient refuser l'entrée: délit de sale gueule, vues, revues, archi revues. "J'ai tué pour elle", "Assurance sur la mort" surtout ! L'hommage a du mal à survivre ; par contre le plagiat se porte comme un charme.

Et puis à part Eva Green
qui ose encore en européenne à se dénuder, que dire de ses voiles pudibonds sur les nichons de ses dames et sur les bistouquettes de ces messieurs ? Comment parler de nos jours des instincts les plus bas de l'humanité, de la pourriture morale et faire sa mijaurée sur la nature même du corps humain, ses désirs, ses détours et ses affres? On ne lésine pas sur les giclées de sang, les yeux énucléés, les crânes écrasés mais le poil pubien, beurk, caca? Ahurissante Amérique!

Et autant le noir se marie efficacement à la lecture d'une bédé ou au mouvement du cinéma, autant ici j'ai trouvé le récit par moments extrêmement statique, non par lui même, mais par les personnages surtout masculins. Les féminins sont mieux mis en valeur. Une chorégraphie des corps masculins manque au récit pour lui donner un peu plus de vie. Difficile dans ce cas de s'émouvoir pour les personnages. Ils sont trop inertes, irréels par désincarnation. Des masses de viandes fantasmatiques.

Peut-être aussi que l'absence de lien puissant entre les différentes histoires annihile en moi de tenir le récit? Combien de fois ai-je regardé la montre pendant le visionnage ? Une chose est sûre : j'étais heureux d'en avoir fini.

Trombi:
Eva Green:

Mickey Rourke:

Jessica Alba:

Josh Brolin:

Joseph Gordon-Levitt:

Rosario Dawson:

Bruce Willis:

Powers Boothe:

Dennis Haysbert:

Ray Liotta:

Christopher Meloni:

Christopher Lloyd:

Jaime King:

Juno Temple:

Lady Gaga:

Jeremy Piven:

Marton Csokas;

Jamie Chung:

? et Jude Ciccolella:

Julia Garner:

Bart Fletcher:

Bob Schreck:

Lawrence Varnado:

? et Dimitrius Pulido:

Emmy Robbin:

Johnny Reno:

?

mercredi 24 décembre 2014

Mad Men saison 5



2012
Saison 5
13 épisodes

Réalisateurs: Jennifer Getzinger - Jon Hamm - Matt Shakman - John Slattery - Scott Hornbacher - Michael Uppendahl - Phil Abraham - Chris Manley - Matthew Weiner
Comédiens: Jon Hamm - Elisabeth Moss - Vincent Kartheiser - January Jones - Jared Harris - Christina Hendricks - Jessica Paré - John Slattery

Notice SC
Notice Imdb

Vu sur le net



Nom de dieu de nom de dieu! Après avoir vu et apprécié la finesse d'écriture et la richesse imaginative des quatre premières saisons, j'étais très loin de penser qu'il était possible de faire mieux. Cette cinquième saison a su, par trois ou quatre fois, me surprendre à grands coups de claque : c'est un petit bijou, la meilleure saison jusque-là, un objet ciselé de telle façon que j'ai par moments été très admiratif, que je me suis senti tout petit devant un monument grandiose, pas écrasé non plus, mais honoré, privilégié.

Le sentiment qui reste le plus fort, c'est certainement une espèce d'incompréhension, la part de mystère devant la magnificence de la création. Comment font-ils ? Comment ont-ils pu imaginer cela et réussir par l'écriture, par les dialogues, par la mise en scène à produire le spectacle de ces séquences avec ces enjeux et ces personnages bouleversants, intelligents de complexité ? Comment tout cela, toute cette mécanique, cette richesse, cette variété d'éléments disparates, toutes ces choses qui sont exprimées avec nuances et précises à la fois, comment tout cela peut tenir debout, avec pareille grâce, avec cette dextérité, avec ce réalisme, ce poids, cette profondeur et cet équilibre incroyable ? Comment font-ils pour créer cette perfection dans l'écrit d'abord et dans la traduction, la concrétisation de la mise en scène ?

C'est beau, intelligent et fort émotionnellement, rempli de chair et d'âme! Je suis époustouflé, je n'arrive pas à imaginer le "comment". On a atteint des sommets créatifs qui me dépassent tellement. C'est comme entrer dans la Sagrada Familia, lire Proust ou Céline, ou bien admirer la Joconde. Il me faudrait un œil plus exercé et sans doute une intelligence plus costaude pour analyser une œuvre pareille avec justesse. Mais il est clair que "Mad men" se place parmi les œuvres majeures dans l'histoire de la télévision. D'ores et déjà.

La saison est si riche que tous les personnages principaux (et ils sont nombreux), tous sans exception, se voient octroyer une attention soutenue. Les acteurs ont le temps de fouiller leur personnage et de les amener sur des notes parfois jamais atteintes jusqu'à maintenant. J'ai l'impression qu'il n'y a guère de temps morts lors de cette saison et que véritablement tout le monde a droit à une longue introspection.

Même Rich Sommer
 dans le rôle de Harry Crane à cette possibilité, ce qui était plus rare lors des saisons précédentes. Et chose primordiale, étonnante autant que jouissive, les personnages offrent de nouvelles facettes. Il ne s'agit pas de redites, mais bel et bien d'approfondissements ou de découvertes parfois très surprenantes.

J'aime particulièrement le portrait doux-amer que dessine John Slattery
 avec un Sterling aussi comique que mélancolique. Le personnage était drôle, intelligent, sûr de lui, incisif, il est maintenant plus attendrissant, fragilisé, beaucoup plus complet, souvent émouvant.

Celui de Vincent Kartheiser,
Campbell, est toujours aussi inapte à entendre les autres. Il lui manque cette intelligence sociale qui en fait un être inadapté, trop égocentrique, toujours en état de faiblesse vis à vis des autres, en conflit permanent, incapable de gérer les coûts de cette compétition qui le dépasse et qu'il s'échine à rendre perpétuelle. Aveuglé par la peur et l'absence d'imagination, il n'en est pas non plus dépeint comme un sinistre con, il reste humain dans ses faillites, ses accès d'espoir, son désarroi, toujours, face à la réalité. J'aime beaucoup ce personnage malgré ses réactions souvent terriblement puériles et antipathiques.

Lane Pryce (joué par Jared Harris)
 trouve sa grande saison. La précédente était pas mal aussi pour lui. Mais cette fois, il a encore davantage droit au chapitre et passe par des extrêmes inaperçus auparavant. Bouleversant, l'acteur le maintient entre puissance et faiblesse sur des tonalités surprenantes. Dans son attitude toute britannique, refusant l'échec et le déshonneur, l'exigence morale de Pryce atteint des cimes de subtilités dans le jeu. Parfois intransigeant, à d'autres moments il parvient à un laisser-aller qui épate.

Dans une certaine mesure, il partage là un trait du personnage de Don Draper (Jon Hamm).
 Sauf que ce dernier ne réussit pas à transiger, notamment avec ce qui est demandé à Joan (Christina Hendricks). Même s'il est au centre de la série, tous les regards convergeant vers lui, Don est peut-être le moins bien loti en terme de précision cette saison. Il est vrai que l'on a déjà amplement visité le personnage, de fond en comble dans les précédentes saisons. On le connaît par cœur et il n'a plus grand chose à nous apprendre. Il ne fait ici que confirmer, par exemple son manque de souplesse par instants, sa difficulté à comprendre les femmes.

Malgré tout, cela l'acteur de paye le luxe également de très belles scènes, remuantes, avec sa femme (Jessica Paré), avec Pryce (Jared Harris) et avec Peggy (Elisabeth Moss).
 Cette dernière a souvent été au cœur de la série avec Don. Personnage ô combien mystérieux, complexe et auquel on ne peut que s'attacher, elle a de nouveau livré des pans de sa personnalité qui déroutent le spectateur dans un premier temps, puis qui apparaissent comme faisant sens finalement. Je parlais de complexité, c'est sans doute le terme le plus propre à représenter le personnage. Sorte de fille adoptive de Don, partageant des secrets et une admiration pygmalienne pour lui, luttant sans fin pour grandir et exister en tant que femme dans un monde d'hommes qui la fascine, elle livre de nombreuses séquences fort instructives pour mieux l'appréhender, ce qui n'est pas une mince affaire.

Restons avec les femmes et goûtons le trajet du personnage de Megan Draper (Jessica Paré).
 A la sortie de la saison 4, je craignais que cette petite secrétaire timide ne soit pas plus importante qu'elle n'apparaissait, pale, fluette, sans envergure. Or, cette saison, son personnage affiche une belle ambition. Là encore, le travail d'écriture sauve le personnage, en l'étoffant, la faisant paraître plus riche et plus difficile à apprivoiser.

Pour finir, Joan Harris (Christina Hendricks)
 n'en finit pas de surprendre. Cela faisait plusieurs saisons que la carapace de femme forte avait laissé entrevoir des craquèlements puis de réelles fêlures. Sur cette saison 5, dans la continuité, les failles s'élargissent. Elle est mise à contribution pour rendre la saison encore plus émouvante. Que de coups elle a dû endurer, mais cette fois-ci, c'est une grosse somme! Et sa solidité est alors mise en évidence. Ce personnage est d'une grande force, mais que d'embûches à éviter pour survivre ! Il n'en demeure pas moins vrai qu'elle est la seule femme à être parmi les leaders de la boîte de pub.

Toujours en retrait, mais beaucoup moins que dans la saison précédente, Betty (January Jones)
 continue de de s'auto-détruire, en petite fille vexée qui se punit et gère définitivement mal son immaturité, flirtant avec la folie par moments. Peut-être incarne-t-elle un des personnages les plus pathétiques de la série, une desperate housewife avant l'heure. Sur le fil d'un sale rasoir.

Voyez comme cette incroyable série accumule les personnages foisonnants de petites histoires très humaines! Potentiellement étouffante, cette distribution fait pourtant la richesse des scénarios.

Il fallait pour que cette profusion d'histoires dans l'histoire ne bascule pas dans l'indigeste une qualité d'écriture exceptionnelle, mais tout autant une très bonne troupe de comédiens.

La direction de tout ce petit monde, malgré les changements de metteur en scène entre les épisodes reste toujours cohérente. Le format tient la route. Il est vrai qu'au bout de la cinquième saison, il est quand même heureux que les acteurs se connaissent plutôt bien et maîtrisent également l'évolution de leur propre personnage, avantage du format sériel par définition. J'ai une foutue hâte de voir la saison 6!

Trombi:
Aaron Staton :

Kiernan Shipka:

Christopher Stanley:

Robert Morse:

Alison Brie:

Peyton List:

Embeth Davidtz:

Charlie Hofheimer:

Larisa Oleynik:

Christine Estabrook:

Teyonah Parris:

Ben Feldman:

Sam Page:

Mädchen Amick:

Julia Ormond:

Ronald Guttman:

Myra Turley:

Marten Holden Weiner:

Alexis Bledel:

Michael Gladis:

Joel Murray:

John Sloman:

Beth Hall:

Alexandra Ella:

Meghan Bradley:

Jay R. Ferguson:

Jeff Clarke:

Brian Scolaro:

Stephanie Drake:

Dennis Apergis:

Pamela Dunlap:

Adria Tennor:

Robin Pearson Rose:

Stephen Mendel:

Hayley McFarland:

Zosia Mamet:

S.E. Perry et Alyson Reed:

David Hunt?

Amanda Bauer:

Cherilyn Wilson:

Talia Balsam:

Ray Wise:

Doug Tompos et Dennis Haskins:

Richard Fancy:

Mark Famiglietti:

Anna Wood:

Nicholas Guest:

James DuMont:

Wajid:

Sadie Alexandru:

Kevin Rahm:

Gary Basaraba:

Jay Paulson:

Emily Baldoni: