1949
Titre original: A Letter to Three Wives
Titre francophone: Chaînes conjugales
Cinéaste: Joseph L. Mankiewicz
Comédiens: Jeanne Crain - Linda Darnell - Ann Sothern - Kirk Douglas
Notice SC
Notice Imdb
Vu en dvd
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Critique datant d'avant 2009 et de la création de ce blog:
Revu il y a peu, je ne trouve rien à redire à ma première impression, que je peux publier sans retouche.
Je retrouve ici la délicieuse écriture de Mankiewicz. J'ai revu
récemment l'extraordinaire All about Eve, somptueux bijou de
subtilités et de dialogues sertis sur des comédiens hors-pair.
Dans ce film-ci, Mankiewicz se tourne vers le drame conjugal avec
moins d'humour vachard et ironique ou du moins en l'affrontant de
manière beaucoup moins directe. Le personnage joué par Kirk Douglas, frais et gai, a tout de même le verbe haut et la dentition
dure pour la molle et fade engeance publicitaire (le discours du
professeur sans le sou sur la mièvrerie des médias est on ne peut
plus d'actualité encore et d'une puissance bien sentie).
Mais mis à part cet épisode, le film se révèle beaucoup plus doux
dans sa manière d'aborder ses Desperate housewives. Dans leurs
troubles angoisses, le cinéaste ne les laisse pas s'enfoncer
cruellement. Point de moquerie violente.
Certes, Mankiewicz s'attaque ici aux hypocrisies sociales, à l'image
du couple parfait, à ce qu'il est de bon ton de faire et surtout de
paraître. Et le personnage central que l'on ne voit jamais mais qui
règne en maître du jeu, cette Addie Ross figure l'aiguillon, le
prétexte à nous immiscer dans l'introspection de ces trois femmes.
La première épouse (Jeanne Crain)
doute d'elle même, de son intégration dans la
petite ville en faisant le lien entre la société et son couple lui
même.
Le deuxième (jouée par une Ann Sothern
que je ne connaissais pas et
qui m'a emballé) souffre de sa position sociale plus élevée que
celle de son mari (Kirk Douglas).
Ce couple permet à Mankiewicz de
ridiculiser les arriérés sous-entendus sociaux et culturels qui
pèsent sur les couples, les différentiels pesants, la place de la
femme par rapport à son mari etc.
Le troisième couple donne à Linda Darnell
un rôle très dense et
émouvant, d'une femme qui épouse un porte-monnaie. Les deux mariés
sont si conscients que leur mariage ressemble à un marché, qu'ils
se convainquent d'en être les dupes réciproques. Lui est surtout
persuadé qu'elle l'a mené là par le petit bout de la quéquette. Mankiewicz en profite, le coquin, à dépeindre frontalement en fin
de compte un parfait exemple de prostitution conjugale, à laquelle
la société incite insidieusement à certains égards.
Mais le regard de Mankiewicz n'est pas du tout noir, malgré tous les
éléments corrosifs du scénario. Il parvient à donner une
distance, un recul remarquable à son propos. Sur le fil du rasoir et
du pathos, il se débrouille pour tisser une comédie romantique
anticonformiste, un film très agréable à suivre et en même temps
plein de sagesse et de clins d’œil finaud.
Trombi: