Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général. (cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
mercredi 6 novembre 2013
Phèdre
2003
Titre original : Phèdre
Lieu: Odéon-Théâtre de l'Europe aux Ateliers Berthier
Auteur: Jean Racine
Metteur en scène: Patrice Chéreau
Comédiens: Dominque Blanc, Pascal Greggory, Michel Duchaussoy, Marina Hands, Eric Ruf
Vu en dvd
Une possibilité de découvrir le théâtre de Patrice Chéreau s'offre à vous? Bin, forcément, c'est tentant, même si le spectacle est filmé. Pour le théâtre rien de mieux que d'être spectateur, mais à défaut, le téléspectatorat ne se refuse pas.
L'occasion est d'autant plus belle que j'ai pour Racine une attirance intacte, malgré le temps qui a passé depuis ma dernière lecture, de Bajazet en l'occurrence. Et je ne connaissais pas cette pièce-ci. Bref, le visionnage de Phèdre devenait presque indispensable et je n'ai pas été déçu.
Foutrement bien écrit, le texte porte un souffle parfois incroyable. A entendre ces dialogues et monologues, on pèse combien la langue française peut être belle, complexe, musicale. La densité de ces phrases se ressent d'autant plus facilement que la scansion des acteurs et la façon qu'ils ont de s'approprier la situation est époustouflante.
Dominique Blanc n'est pas une actrice qui m'avait spécialement tapé dans l’œil au cinéma. Ici, sa prestation est pour le moins marquante! Sur deux ou trois scènes, elle est immense et me scotche par la puissance qu'elle dégage. La scène de la jalousie est je crois pour moi celle qui déménage le plus. Chapeau bas!
Pascal Greggory joue Thésée et n’apparaît donc que dans la dernière partie. Son rôle n'en est pas moins difficile, allant de la colère au désespoir lui aussi. Le comédien imprègne une force incroyable à ses scènes.
A noter également dans un rôle moindre (un seul grand monologue), Michel Duchaussoy laisse une impression de grande classe. Le vieil acteur est à l'aise, d'une grande sûreté dans son jeu : beaucoup de pureté.
Je n'en dirais pas autant du jeune Eric Ruf dans le rôle d'Hippolyte. La confrontation entre les deux sur la première scène de la pièce est cruelle pour le gamin. Mais à sa décharge, plus la pièce avance et plus son rôle s'étoffe, les certitudes du personnage étant souvent malmenées et petit à petit, il finit par paraître plus maître de ses mots et de l'expression de ses émotions.
J'ai un peu de mal avec Marina Hands ainsi qu'avec les autres comédiennes. Pour Marina Hands, c'est ce jeu tout en mouvement permanent qui me perturbe. Sa tête bouge tout le temps, dodeline, lâche les mots comme si elle les aboyait, c'est à la longue un truc qui m'a paru pénible. C'est donc un ressenti tout personnel, pas objectif pour deux sous.
Outre Racine et ses interprètes, ce spectacle est un petit bijou de mise en scène. La manière dont les comédiens investissent la scène est enthousiasmante. D'autant que la structure même de cette scène de théâtre, le lieu, permet aux spectateurs d'être au cœur de l'action. Les comédiens entrent et sortent de tout côté, plongeant le spectateur dans la tragédie. Le théâtre, spectacle vivant par excellence, peut-il l'être encore plus?
Ce mur gigantesque fait penser à ces palais jordaniens de Petra, cette roche habitée, travaillée où les drames humains se sont inscrits pendant des millénaires. Ici, elle attire les regards et impose d'emblée une atmosphère pesante, entre solennité et tristesse. Les murs sentent le pouvoir et la mort. La lumières qui y est projetée change et trouble la vision du public, la pétrit, la façonne avec subtilité. J'ai été ébahi par cette mise en place.
En dehors de ces murs, les décors de Richard Peduzzi sont assez sommaires, comme les vêtements, sans extravagance, comme on pourrait s'imaginer l'austérité de cette antiquité encore balbutiante. Mais surtout, cela suscite un réalisme, une sorte de proximité qui s'associe parfaitement à la mise en scène.
C'est donc un très agréable et très marquant spectacle auquel j'ai eu droit. Pas forcément facile à suivre il est vrai, tant le texte de Racine peut par moments sembler exiger une bonne dose de culture antique et cette langue du XVIIe étant de plus en plus oubliée. Mais restent des impressions et des émotions concrètes, durables, qui parlent encore car naturelles, innées, bouleversantes de vérité.
Reste du trombi:
Nathatie Bécue:
Christiane Cohendy :
Agnès Sourdillon:
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire