mercredi 14 août 2013

The shining



1980

Cinéaste:Stanley Kubrick
Comédiens:Jack Nicholson - Shelley Duvall

Notice SC
Notice Imdb

Vu en dvd




Quand Kubrick s'attaque au genre de l'épouvante, il le fait avec soin et moyens. Il semble se donner l'impossibilité d'échouer. Entre Bartók, King, Nicholson et la froideur de ce grand hôtel vide, il s'est doté de plusieurs armes de destruction massive.

A priori, pendant le visionnage, on est frappé par la simplicité du film, son incroyable fluidité : le récit coule de source, naturellement. L'histoire n'est pas bien compliquée et le scénario de Kubrick et Diane Johnson nous emmène tranquillement, mais sûrement sur les bords du précipice de la folie avec une sureté impressionnante. On sent tellement la maitrise de l'histoire qu'on se laisse aller au spectacle comme l'enfant se laisse emporter par le fantastique d'une histoire racontée à la veillée. Oui, c'est ça : "The shining" est un conte raconté autour d'un feu de camp, qu'on chuchote comme un secret inavouable. On sait que c'est pour de faux, mais la douceur de la petite peur qui monte n'est pas si désagréable. Bien au contraire, aussi lui laisse-t-on la liberté de grimper le long de l'échine, pour le grand frisson de la nuit. "The shining" fait partie de ces petits chefs d’œuvre de l'effroi qu'on a plaisir à s'infliger de temps en temps.

Parce que bien construit, très équilibré, superbement conçu, filmé avec parfois beaucoup de gourmandise. On voit bien que Kubrick échafaude ses plans avec grand soin. Ses décors sont magnifiques et la caméra les embrasse goulument. Je crois qu'outre les plans de la grande salle de bal, j'aurais du mal à résister à un beau blu ray afin d'admirer les dernières séquences dans le labyrinthe bleu nuit, ouaté et frigorifié. La nébulosité de la fin est somptueuse, d'une picturalité évidente.

Certains plans sont très "Stephen Kingiens". Incroyable comment Kubrick a su mettre en image ce jeu de mise en scène qui fait le charme de Stephen King! Il y a une couleur, des thématiques, des types de récit qui caractérisent l'univers de King et Kubrick parvient avec une telle aisance à les mettre en forme tout en gardant la maitrise de son propre cinéma! J'en suis abasourdi. C'est sans doute à ce genre de signes qu'on reconnait les grands cinéastes : la capacité de dégager un style personnel tout en s'appropriant celui des autres pour créer finalement des œuvres très différentes.

Mettons les mains dans le cambouis et voyons ce qui parait éclatant. D'abord la musique. Là encore Kubrick sait donner à la musique un des rôles principaux. Et il n'hésite pas à prendre des risques. Oser utiliser ce style ultra austère, à la limite de la brutalité parfois, est en soi un pari couillu, mais gagnant. La simplicité du rythme, la sécheresse de la musique rendent l'habillage sonore presque oppressant. Très souvent présente, la musique appuie là où il faut : à fleur de peau, flirtant avec la stridence, proche de la cacophonie. On ne peut pas parler de plaisir à l'écouter car elle bouscule le spectateur, le conforte dans son malaise. Vraiment bien foutu tout ça.

L'autre grand atout de Kubrick, sa paire d'as, reste sa façon de filmer, son aptitude à penser son récit dans l'image. Deux exemples parmi tant d'autres : ces longues courses à travers les couloirs de l'hôtel à suivre le gamin sur sa petite auto à pédales ou bien encore ce plan fixe sur le visage de Jack Nicholson, légèrement affaissé, de façon à souligner les accents circonflexes que forment ses arcades sourcilières et optimiser le dessin diabolique de sa face. On pourrait évoquer le flot de sang sortant de l'ascenseur, les ombres découpées par les projecteurs dans les allées du labyrinthe, le visage halluciné de Nicholson passant à travers la porte etc. Les images marquantes et parfaitement orchestrées sont légion et font de ce film un petit bijou visuel et narratif, rappelant à ceux qui l'oublieraient que Stanley Kubrick est un grand auteur.

D'aucuns citeraient surtout Jack Nicholson dans la liste des éléments majeurs qui font de "The shining" un grand film. Je suis un chouïa plus partagé! Ohhh, calmez-vous! J'ai dit "un chouïa". J'adore cet acteur, un cabotin de première catégorie, mais justement, je le préfère en retenue. Or, ici, il doit exprimer la lente mais inexorable montée de la folie chez un personnage de plus en plus violent. Difficile dans ce cas là d'être dans la retenue. Et sur une ou deux scènes, je l'ai trouvé un poil trop relâché, laissant rouler ses yeux, grimaçant de façon un peu trop excessive. Le plupart du temps il est juste parfait. Mais je dois confesser que sur ces deux scènes, il m'a semblé dépasser les bornes, ce qui incite à modérer mes ardeurs sur sa composition générale. Je note à ce propos que je ressens ces exagérations seulement maintenant, alors que lors des deux ou trois précédents visionnages, j'étais resté estomaqué par sa présence et la précision de son hystérie. Comme quoi, tout cela est tellement subjectif!

En ce qui concerne Shelley Duvall, je n'ai jamais été spécialement interpellé par ses prestations. Il est vrai que je ne l'ai vue que dans deux ou trois films seulement. Elle crie peut-être un peu trop pour dans ce film-là.

Le gamin, Danny Lloyd, est plutôt bluffant, un peu rigide comme la plupart des mômes devant une caméra, mais son malaise grandissant est bien rendu. Il a quelques scènes très difficiles et s'en tire très bien.

Comme souvent avec les histoires de King, la portée de ce conte reste limitée aux territoires de l'effroi. Sa portée est avant tout émotionnelle, primaire. Ce n'est pas sale, mais cela ne raconte rien de bien important, cela charrie son lot de boules au ventre, de gouttes de sueur. Et ainsi on est transporté vers des émotions que l'on savait si bien gouter lorsqu'on était enfant. La peur du grand méchant loup façonne, fait grandir et ce film a sûrement contribué pour ma part à ce genre de construction cinéphilique d'abord, mais même peut-être intime. Un grand film pour adolescents et pour cinéphiles.

Trombi:
Scatman Crothers:

 Barry Nelson:

 Philip Stone:

Joe Turkel:

 Lia Beldam:

Billie Gibson:

 Barry Dennen:
Lisa Burns et Louise Burns:

 Norman Gay:

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