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mardi 28 février 2017

Les malheurs d'Alfred



1972

Titre original: Les malheurs d'Alfred

Cinéaste: Pierre Richard
Comédiens: Pierre Richard - Anny Duperey - Pierre Mondy

Notice SC
Notice Imdb
Notice Le monde des Avengers

Vu en blu-ray

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Le film “Pierre Richard” est un genre à part entière : il a ses formes, ses récurrences, ses forces et ses faiblesses bien entendu, des couleurs, un tempo, un ton qui appartiennent à son auteur / acteur de toute évidence. Et Les malheurs d’Alfred, comme d’autres (Je ne sais rien mais je dirai tout, Le distrait, etc.) en est la parfaite illustration.

Alliant à la fois le comique slapstick, tarte à la crème, un humour physique et très visuel donc et un humour plus poétique, tendre, romantique, mais capable de mordant ironique, osant  même la critique politique à l’occasion, ses thématiques se rassemblent autour d’un personnage, toujours le même, un malchanceux, un étourdi, quelqu’un qui vit dans son propre monde, un rêveur, maladroit et utopiste, un clown peut-être ici plus triste qu’à l’habitude. Car dans ses malheurs, il se rend compte que cette déveine lui rend la vie impossible, misérable.

C’est un personnage qui trouvera chez des auteurs plus rigoureux, comme Francis Veber par exemple, des situations et des dialogues bien plus percutants. Toutefois, Pierre Richard sait s’entourer de belles plumes et d’esprit on ne peut plus innovants, notamment Roland Topor, un type que beaucoup considèrent comme génial, et je ne suis pas loin de penser comme eux, même s’il me semble ne pas le connaître suffisamment.

Sous l’égide affectueuse et rieuse d’Yves Robert  qui joue un petit rôle en forme de clin d’oeil paternel, la réalisation de Pierre Richard
 reste plutôt neutre. Académique, sans bavure non plus. Le générique est comme souvent dans ses films une oeuvre comique en soi. Avec des animations amusantes et une musique de Vladimir Cosma pleine d’entrain, le générique semble pouvoir donner un bon rythme et son envol au film.

De très bons acteurs viennent proposer quelques jolis numéros. Un Paul Le Person
par exemple fait des merveilles. Paul Préboist
par quelques apparitions répétées est une sorte de gimmick à lui tout seul fort plaisant. Quant à Pierre Mondy,
 il est tout bonnement génial, comme d’habitude, en animateur cynique, menteur, obséquieux ou exécrable selon à qui il s’adresse, bien entendu. Il a un beau rôle de salop. Ce type est un très grand, un régal de comédien.

Quelques gags par-ci, quelques idées par là font malgré tout vivre le film, certes, mais malheureusement, il faut bien avouer que cette vie est par moments bien pâlichonne. Ce n’est pas qu’on s’ennuie, mais la finesse n’est pas toujours au rendez-vous et le scénario s’alourdit, dès lors on a le sentiment que la comédie s’assoupit, que le rythme devient erratique. Parfois cet humour visuel et physique me laisse au mieux indifférent.

Reste que ses multiples diffusions télé dans ma jeunesse ont dû forger un lien affectif particulier, insubmersible qui fait que j’aime ce film : la séquence au commissariat, les scènes de tests ou bien les effets du poison sur Pierre Mondy sont des moments que j’aime toujours autant.

Au final, aujourd’hui je balance entre rires francs et légers bâillements. Ce déséquilibre incompréhensible me fait dire que le film est moyen en somme.

Trombi:
Anny Duperey:

Jean Carmet:

Mario David:

Francis Lax:

Robert Dalban:

Jean Obé:

Marco Perrin(droite, right):

Yves Elliot:

Jean Saudray:

Daniel Laloux:

Evelyne Buyle:

Marcel Gassouk:

Danou Valdrini:

Jean Mermet (droite, right):

André NaderGeorges BellerPatrick Messe et Yves Robert

Ren Villers?:

La cage aux souvenirs



2006

Titre original : La cage aux souvenirs

Auteur: Pierre Mondy
Editeur: Plon

Notice SC

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Quel bonheur que de suivre l’aventure d’une vie d’un personnage aussi enthousiaste et si sincère ! Focalisé sur sa carrière d’acteur et de metteur en scène au théâtre, à la télé et au cinéma, le livre n’est certes pas exhaustif, mais s'arrête avec à la fois sagacité et générosité sur les points qu’il juge essentiels.

Pour qui aime la carrière de ce grand bonhomme, le périple est savoureux. J’entends sa voix, si particulière et familière tout en lisant ses phrases. Le style est simple, élégant, comme l'acteur. À son image, le rythme est soutenu, très équilibré, balançant entre réflexion et émotion, laissant tout de même à l'affectif sa plus grande part. Ronde et gracieuse, la lecture est très plaisante. J’ai beaucoup aimé.

Pierre Mondy traduit très bien ses émotions. On les partage avec facilité. On a le sentiment qu’il se livre avec franchise, sans la retenue frustrante habituelle dans ce genre d’exercice. Il y a beaucoup d'amour dans ses mots : pour sa famille, ses amis, son métier. Cet amour de la vie se répand comme une délicieuse coulée de miel au fond de la gorge. Lecture contagieuse : sourires et larmes, j’avoue avoir été pleinement touché. J’aimais l’acteur, je l’aime davantage, l’homme est aussi une belle âme.

Un chariot dans l'ouest



1972

Titre original: Un chariot dans l'ouest
Autre titre: Les tuniques bleues, tome 1

Auteur: Raoul Cauvin
Dessinateur: Louis Salvérius
Editeur: Dupuis

Notice Bédéthèque
Notice SC
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La série des “Tuniques bleues” a été l’une des aventures bédéphiles les plus emballantes de ma jeunesse. En entamant cette relecture, je me suis remémoré le sel que ses auteurs avaient su apporter à leur œuvre.

En effet, elle est encore très drôle. L’humour y est taquin, peu corrosif, un brin méchant toutefois pour son personnage principal le sergent Chesterfield. Le jeu formidable que va livrer le sergent face à son caporal Blutch n’est pas encore au centre de l'intrigue. Les auteurs se cherchent.

Dans le dessin, je préfère la rondeur du trait de Willy Lambil, plus ample, plus épais que la finesse de celui de Louis Salvérius. Pour le moment, c’est donc ce dessin très précis, mais qui me semble plus fragile de Salvérius. Les différences entre les deux dessinateurs sont si importantes que passer d’une époque à l’autre crée un véritable hiatus visuel, compliqué. J’ai du mal. Entendons-nous bien : je viens là d’évoquer une préférence, non que le dessin de Salvérius est moche, mauvais, ni déplaisant. Au contraire, si la série avait perduré sous son crayon, je suppose qu’elle aurait eu autant de succès. Sans doute la question de l'habitude y est pour beaucoup dans ma préférence pour Lambil.

Ce premier épisode est très bien écrit, très équilibré, fondé sur l'imagerie traditionnelle du grand ouest : la cavalerie, le désert rocailleux, les indiens, les wagons. Le rythme est d’une maîtrise parfaite, alternant action, comique et temps de respiration de façon judicieuse. Vraiment bien écrit. Pas étonnant que cette série ait eu autant de succès : elle le doit en très grande partie pour l’imagination solide de Raoul Cauvin et son art du récit.

Même si c’est un bon épisode, il y aura plus tard des aventures encore meilleures, ajoutant de l'émotion, de la chair, un peu plus de maturité sans doute.

jeudi 23 février 2017

Sausage party



2016

Titre original: Sausage party
Titre francophone: Sausage party, la vie privée des aliments

Cinéastes: Greg Tiernan - Conrad Vernon

Notice SC
Notice Imdb

Vu en streaming

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Sausage party est un dessin animé pour adultes (ou au moins pour adolescents), interdit aux enfants, aux pudibonds, aux ayatollahs et autres imbéciles coincés du postérieur. Bien sûr, on peut être exclus de cette engeance détestable et ne pas se gondoler devant ce film. Hors de question de houspiller les dogmatiques tout en me comportant moi même comme tel. M’enfin, le film s'inscrit suffisamment clairement dans une tradition de la nouvelle comédie américaine, grossière et fortement sexuée pour qu’on ne puisse pas jouer les vierges effarouchées sans être de mauvaise foi.

Bien évidemment que c’est grossier et hyper sexualisée, c’est volontaire ! Oui l’humour y est gras, mais le film ne s'arrête pas à des “bites”, des “couilles” et des “nichons” proférés à la mitrailleuse. Sous ce vernis, le scénario a l'intelligence d'aborder des thèmes bien sérieux, voire graves.

Lisant dans le même temps un ouvrage d'histoire philosophique j’ai été frappé par la réflexion métaphysique suscitée par les personnages à l'égard de ce paradis tant attendu et ces êtres supérieurs à leur condition et surtout, cet espoir, ce bonheur de croire en ces dieux plutôt que de faire face à la réalité plus matérialiste mais plus cruelle aussi. Je lisais en effet que Épicure fustigeait déjà ce type de forfaiture chez ses contemporains il y a 2400 ans.

Et le film, de ne pas se résumer seulement à cela, se met en tête de traquer joyeusement bien d’autres bêtises, qu’elles soient sexuelles ou racistes.

 Bref, le film est autant grossier que politique, drôle et pertinent. Si bien qu’à fustiger sa forme, on perd son temps et son énergie à oublier le fond, absurde et fondamentale vacuité ! Dommage que je ne veux me faire subir connement et par conséquent je profite à plein du joyeux bordel apparent, de cet enthousiasme évident dans l'écriture et dans l'invention. Chouette bon film.

mercredi 22 février 2017

Des petits hommes au Brontoxique



1974

Titre : Des petits hommes au Brontoxique
Autre titre : Les petits hommes, tome 2

Auteur: Pierre Seron
Dessinateur: Pierre Seron
Editeur: Dupuis

Notice Bédéthèque
Notice SC

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Après avoir relu avec un certain enthousiasme le premier tome des aventures des petits hommes “L’exode”, ce deuxième opus est très décevant. Ce n’est pas  tant l’histoire, ni le dessin que les dialogues qui m’ont un peu gâché la lecture. Par moment très plats, quelquefois franchement mauvais, avec un humour vieillot, lestés de calembours éculés, les dialogues alourdissent le rythme de lecture, n’apportent rien de décisif. Est-ce le fait que Pierre Seron ne soit plus appuyé par Albert Desprechins et donc en solo sur cette histoire? Possible.

Heureusement, le dessin reste alerte. De plus, l’histoire amène un certain dynamisme. Je remarque que les tomes qui me plaisent le plus dans cette série étaient ceux où les petits hommes devaient voyager, parcourir un certain périple. Ici, ils doivent préparer, puis véritablement accomplir un voyage au Brontoxique pour sauver le professeur. Le voyage n’a rien d’extraordinaire, mais il casse la routine, donne un peu d’action et de rythme.

Sans la fraîcheur des aventures de Spirou et Fantasio, cet épisode rappelle un peu l’exotisme que Franquin a su créer. Mais le rappel n’est que fugace. Je suis en effet quelque peu refroidi à l’idée de lire l’intégrale. Je comprends mieux le fait que j’ai délaissé cette collection.

mardi 21 février 2017

Le client



2016

Titre original: Forushande
Titre francophone: Le client
Titre anglophone: The salesman

Cinéaste: Asghar Farhadi
Comédiens: Taraneh Alidoosti - Shahab Hosseini - Farid Sajjadi Hosseini

Notice SC
Notice  Imdb

Vu en salle

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Cela faisait déjà quelques temps que je n’avais pas vu un film d’Asghar Farhadi. Celui-ci ne figurera sans doute pas parmi ses meilleurs.

Néanmoins, par certains aspects, il reste solide, notamment grâce à un scénario assez bien ficelé. Certes, il n’est pas exempt de reproches à faire sur la fin. Le film s’étire en longueur avec un dénouement qui n’en finit plus de proposer des détails superfétatoires. Ce n’était pas nécessaire à la compréhension des enjeux.

Il n’en demeure pas moins que l’ambition obsessionnelle de Farhadi (dépeindre la sensation d'extrême tension allant jusqu’à l’étouffement) est une nouvelle fois au coeur du film. Peut-être même cette oppressante tension n’a-t-elle jamais été aussi longuement et fortement entretenue? Impossible de trouver un seul vrai temps de respiration : on reste accroché à son fauteuil, le souffle coupé par cette situation hyper malsaine dans laquelle vient se fourrer Emad (Shahab Hosseini) de manière tout aussi dramatique et compulsive.

Difficile d’en faire le reproche au cinéaste. J’imagine sans peine comment tous les rapports humains sont cadenassés sans cesse dans une société tenue par autant d’astreintes, comment cela peut déboucher sur des blessures et des situations aussi pesantes jusque dans les petites scènes (taxi, école, théâtre) où se manifeste toujours cette espèce de sclérose morale en continu. Tout dans le scénario nous le rappelle. La peur se loge partout, elle peut éclater à chaque instant, tout le monde l’éprouve. Comment ce fait pourrait-il échapper au film de Farhadi?

L’angoisse a toujours été et est toujours actuellement au cœur de son cinéma. Peut-être que la dérive d’Emad est ici essentielle, en corrélation avec le fossé qui se creuse entre lui et Rana (Taraneh Alidoosti)? Difficile de mettre en adéquation liberté intime, respect d’autrui et les questions d’honneur, la sévérité du système politico-religieux. Forcément, ce n’est pas sans perversion, violences et mise en péril des sentiments. Le film le montre assez bien.

Les trois acteurs principaux (Shahab HosseiniTaraneh Alidoosti et Farid Sajjadi Hosseini). On ne dira jamais assez combien Asghar Farhadi est un directeur d’acteurs impressionnant. Je suis toujours bluffé par ce que ses comédiens sont capables de donner et comment la caméra parvient à capter le moindre détail de leurs compositions. Pour quelqu’un comme moi qui adore cet aspect, c’est toujours un très grand plaisir que de voir ses films. Ce dernier ne déroge pas à la règle.

En raison de la fin ratée, ce film pourrait ne pas totalement convaincre, notamment en regard de la quasi perfection de certains autres films du cinéaste, cependant, il serait injuste de le condamner. Il mérite d’être vu, pour son efficacité et sa capacité à prendre le spectateur aux tripes, en soi expérience toujours remarquable, suffisamment rare pour le souligner.