2015
Cinéaste: Todd Haynes
Comédiens: Cate Blanchett - Rooney Mara
Notice SC
Notice Imdb
Vu en salle
--------------
Film
en deux temps, deux moments. La première heure m'a paru durer une
éternité. Todd Haynes prend son temps à présenter ses personnages
après un flash-forward initial, à les relier, tout doucement. Ils
passent même un temps fou à se renifler. C'est un parti pris que je
peux comprendre. Mais ça m'a saoulé.
Les
deux femmes, une fois parties sur la route, ont continué leur valse
hésitation, cela devient très irritant. J'entends bien que pour
faire un film réaliste Haynes ait voulu retracer cette longue parade
amoureuse étant donné l'idée que l'on se faire de l'homosexualité
féminine dans l'Amérique des années 50. On imagine bien que
s'engager dans une telle relation avec une jeune femme pour une femme
mariée représentait une aventure peu évidente à embrasser de
front. Et par conséquent, cela devait constituer une source
incroyable de questionnements, de réflexions, de temps préalable
qui justifient cette attente. Logiquement, imparable.
Reste
que Todd Haynes ne réussit pas à décrire cela à l'image sans me
faire bailler. Fort heureusement, cela valait la peine d'attendre que
ces dames sautent le pas et osent enfin passer la seconde. La
deuxième heure est formidable !
Plaçant
le film sur une toute autre échelle, un autre niveau que la simple
histoire de cul, cette partie met en perspective l'histoire
particulière pour l'associer à divers thèmes universels majeurs et
intemporels : l'homophobie, l'amour, les souffrances de la
séparation, la bêtise, la peur, etc. On dépasse en effet très
vite l'élément principal de départ, à savoir les affres de
l'homosexualité dans une société homophobe (surtout celle des
femmes, plus compliquée à vivre car considérées comme dévolues
aux désirs des hommes).
La
difficile séparation de Carol (Cate Blanchett) avec son mari, leur
bataille pour la garde de leur fille, en parallèle à l'idylle
naissante fait glisser le film vers une démonstration très
émouvante des trésors de cruauté qu'un couple peut s'infliger sous
prétexte d'amour (en fait pour des raisons de possessivité
excessive).
La
séquence de Cate Blanchett à la réunion de négociation avec les
avocats restera selon moi comme une très grande scène. La
comédienne est d'une justesse incroyable! L'émotion est très
forte.
À ce
propos, je m'étonne que Rooney Mara ait obtenu la palme
d'interprétation à Cannes. Certes, la petite jeune est très bien,
convaincante, mais son personnage est d'abord moins difficile à
incarner, et surtout Cate Blanchett est tellement plus forte,
creusant profondément, jouant si subtilement dans les menus détails.
C'est tellement évident pour moi que je ne comprends pas ce résultat
de palmarès.
Dans
la séquence qui clôt le film, au restaurant (autre très grand
moment de cinéma), par son seul jeu de regard et de sourire, Cate Blanchett nous met au tapis. Ippon direct ! La mise en scène de Todd Haynes m'aura cueilli à deux ou trois reprises, alors que dans
l'ensemble je l'ai trouvée sobre, sans éclat particulier, efficace
sans tapage, je n'irais pas dire conventionnelle mais correcte.
Je
n'ai pas été charmé par le travail de la photo : le grain de
l'image était très "poudreux" sur certains plans. Je ne
sais si c'est dû au procédé technique de projection de la salle ou
à celui de la caméra, mais l'image n'était pas super nette. Ce
petit désappointement visuel n'altère en rien le plaisir émotionnel
suscité par le film.
À la
sortie, j'ai oublié l'ennui de la première heure, je me suis laissé
emporter par la fièvre et la chaleur de la dernière scène.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire