Quand le reptile se fait des pellicules, des toiles, des pages et des dessins... Blog sur l'image et la représentation en général.
(cliquez sur les captures pour obtenir leur taille originale)
En voilà un qui ne vole pas ses récompenses, triplé à Berlin! Le film est tellement bien écrit, mis en scène et joué qu'on se demande comment cette pléthore de talents évidents aurait pu échapper au jury. Avec une force implacable, l'histoire avance et les personnages semblent pris dans une toile inextricable. Cet écheveau kafkaïen que Farhadi met en place petit à petit se sert de la séparation d'un couple comme support. Nader (Peyman Moaadi) et Simin (Leila Hatami) sont sur le point de divorcer. Elle veut quitter le pays, lui, préfère rester pour veiller sur son père victime de la maladie d'Alzheimer. Afin de pallier l'absence de sa femme, retournée chez sa mère, il embauche une femme de ménage très croyante. Il met sans le savoir le doigt dans un engrenage infernal qui le mène droit devant un juge, puis en prison. Farhadi utilise donc cette rupture pour peindre en toile de fond l'oppression que vivent les iraniens au quotidien. La théocratie étouffante du régime est partout présente dans les rapports sociaux. Elle écrase les individus qui vivent continuellement dans la peur. La société ultra-répressive que ce soit sur le plan politique ou religieux, intimement mêlés, ne laisse pas la moindre possibilité de respirer. De ce fait, les gens développent entre eux une violence qui explose souvent de manière douloureuse, comme arrachée, dans des moments impulsifs. Les personnages ne se laissent pas aller à la violence ; la situation leur impose d'expulser leur malaise. Le film montre très bien ce côté suffocant, cet immobilisme désespérant grâce à un scénario très bien écrit où les situations s'enchainent les unes aux autres sans laisser le moindre répit aux personnages. La caméra vacille souvent, à l'épaule mais ne lâche jamais les acteurs. Très peu de scènes d'exposition. Les scènes extérieures sont elles aussi très agressives, que ce soit dans la circulation dense des rues ou dans les allées surpeuplées du tribunal. Rares sont les espaces et les instants où les personnages peuvent prendre le temps de souffler, de se retrouver. Ils n'en ont pas la permission. Les voisins, les créanciers, les policiers, les juges, les conjoints, les enfants, les collègues posent tous un regard réprobateur et inquisiteur. Au sein même de la famille en rupture, ce sentiment de ne pas s'appartenir crée l'espèce d'état d'asphyxie dans lequel tous les personnages se retrouvent piégés, à cause de la société cadenassée, de la religion qui suscite peurs et superstition ou bien à cause des mensonges qu'ils ont fait pour se protéger. Dommage collatéral le plus touchant, Termeh (Sarina Farhadi), la fille de Nader et Simin, est en quelque sorte celle qui est la plus abimée par ces mensonges. Du moins la voyons-nous quitter le monde de l'enfance tellement brutalement en découvrant le mensonge de son père et de la façon dont sa mère l'utilise pour échapper à cette situation que ce personnage parait incarner le mieux la violence de ces séparations, celle de ses parents mais également celle que le système politique et religieux inflige à la société iranienne, tiraillée par ces restrictions et aliénations insupportables. Deux histoires parallèles en apparence se mêlent et se nourrissent d'elles mêmes, la privée et la publique suivent la même ligne, celle d'une fracture qui parait impossible à ressouder. C'est admirablement foutu car inattaquable. Les autorités auraient bien du mal à fustiger ce film car il ne les critique pas de manière directe mais dépeint une réalité qui se révèle effrayante. Malin. Comme le jury de Berlin l'a fait, il faut absolument souligner le jeu formidable de réalisme des comédiens. Tous. Extraordinaires. Je suppose que Farhadi doit beaucoup à ses acteurs. La justesse de leurs jeux, l'intensité qu'ils mettent donnent sans aucun doute le rythme du récit et forcent l'attention du public, subjugué par l'impact, la puissance de conviction. J'en reste baba, épaté. Bravo! Ce thriller social plus que romantique, assène avec une belle maitrise une image iranienne dévastatrice, coup de poing, car j'ose la croire vraie. Mais au-delà du message politique, le travail est tellement bien fait que cinématographiquement, c'est aussi une très belle œuvre d'écriture scénique. J'aime beaucoup. Ébloui.
Même le visionnage d'un très bon Blu-Ray n'y aura rien fait : "Le retour du roi" restera le volet que j'aime le moins. J'ai beau chercher, je ne vois pas un moment qui m'a particulièrement ébloui, que ce soit sur le plan formel ou sur le plan narratif. J'ai même encore une fois trouvé la fin horriblement longue. La scène des adieux sur les quais me parait durer un siècle. Elle n'est toutefois pas aussi fatigante que le personnage Denethor dont l'état psychotique, en disque rayé, sérine la même litanie ad-nauseam. Je ne peux pourtant pas dire que John Noble le joue mal, mais je me verrais bien dire que ses jérémiades me rompent les gonades. De même ai-je été déçu par le revirement sentimental d'Eowyn. Faute d'Aragorn, elle mange le merle Faramir, en deux temps, trois mouvements, dynamique amoureuse improbable que j'espérais crédibilisée par le montage de la version longue. En fait, elle est presque aussi vite expédiée que dans la version en salle. Bon, au rayon chouinage, je crois avoir fait le tour et il serait de bon ton de souligner maintenant que le reste m'a tout de même plu. Si je ne tombe pas en pâmoison devant les scènes de batailles, nombreuses (le film semble une longue série de combats à peine interrompus), elles constituent de très agréables moments grâce à la tension dramatique qu'elles suscitent et maintiennent solidement sur une large partie du film, notamment par une maitrise continue des effets visuels. Somme toute, ce 3e volet, s'il n'est pas à la hauteur du merveilleux de ses devanciers, n'en demeure pas moins un film au suspense intense par moments, seulement un poil bousillé à d'autres par un montage ou un scénario un peu moins bien équilibrés. Je ne sais pas pourquoi au final, ce sentiment s'impose à moi. C'est assez flou. Mini trombi:Sean Astin: Billy Boyd: Ian McKellen: Dominic Monaghan: Viggo Mortensen: Miranda Otto: Andy Serkis: Liv Tyler: Hugo Weaving: Elijah Wood: Lawrence Makoare:
Le sujet de ce film est foutrement osé. Je ne connaissais pas l'histoire. Allez savoir pourquoi, sans doute la sonorité du titre m'a-t-elle fait penser à Malena, je m'attendais à une chronique douce sur l'éveil des sens, un regard délicat et nostalgique sur l'adolescence, ses premiers émois. Pour une certaine part, il s'agit bien de cela, mais pas uniquement. Si le film évoque effectivement cette découverte déstabilisante de la sexualité, le film prend résolument un ton pernicieux, incorrect. Il sort des sentiers battus pour nous raconter une histoire culottée, qui frôle de manière détournée l'inceste puisqu'il y est question d'une relation ambiguë, entre affection et rapports de force, entre une belle-mère et son beau-fils, entre une adulte bizarrement consentante (du moins ne faisant guère preuve d'autorité, c'est le moins qu'on puisse dire) et un adolescent perturbé par ses explosions hormonales. A la mort de sa femme, un riche tailleur catanais (Turi Ferro) embauche une jeune et superbe femme, Angela (Laura Antonelli), pour élever ses enfants, faire la bouffe, le ménage, bref, tenir la maison. Comme il le dit, elle est un ange de douceur. Elle fait preuve d'une telle patience, d'une telle bienveillance qu'elle a tôt fait d'enchanter tous les mâles de la famille. Mais l'un d'entre eux, Nino (Alessandro Momo), va nouer avec elle une relation d'abord encore très enfantine qui fera sourire l'Angela maternelle mais tout en laissant une trace très nébuleuse dans le cœur de la femme, avec une pincée de licencieux qui l'émoustille encore confusément. Peu à peu cette relation devient plus en plus sensuelle. Ne parvenant pas à repousser ce jeune garçon entreprenant dont elle s'éprend même si elle ne veut pas l'admettre, elle va laisser leurs rapports se développer jusqu'à devenir une relation presque sadique. Elle devient le jouet d'un chantage sexuel. Ce qui est formidable dans ce film, c'est la lenteur avec laquelle le scénario fait évoluer cette drôle de liaison. Ce n'est que progressivement que cela évolue. Aussi cette histoire pour le moins ahurissante, qui tient plus du conte érotique et fantasmatique, parvient à garder une tonalité très réaliste. Pas un mince exploit, vous en conviendrez. Il faut souligner que Laura Antonelli, en plus d'être une femme sublime, est une actrice de grand talent, tellement douée que sa prestation allie à une réjouissante crédibilité une certaine dose d'ambiguïté qui ne laisse pas d'être troublante, séduisante. Elle fait très fort. A l'image de cette progression des sentiments entre les deux personnages, Samperi distille ses doses d'érotisme d'abord avec parcimonie, puis de manière de plus en plus affichée et directe sans jamais tomber dans la vulgarité. On sent en effet que le cinéaste joue avec la sensualité des comédiennes, par petites touches, dans une imagerie érotique, soft et adolescente. C'est par Nino et son appétence de plus en plus vive pour les attributs féminins que la tension érotique grandit, prend son ampleur, tout doucement. Tout d'abord les premiers attouchements et la découverte du monde, avec ses battements de cœur, découverte qui ne laisse pas indifférentes les donzelles que rencontre Nino. Petit à petit, le jeune homme prend de l'assurance et exige de plus généreuses offrandes. C'est là que s'installe un chantage auquel Angela répond un peu trop docilement pour être tout à fait honnête. J'ai vraiment aimé cet art du récit, ce crescendo totalement en adéquation avec la nature même de l'érotisme, la légèreté des premiers gestes jusqu'au climax final. C'est admirablement maîtrisé. On est très loin des caricatures que beaucoup de films érotiques peuvent trimbaler. On y respecte les temps, scrupuleusement, ce qui donne au récit cette solidité rassurante. En plus de ce soin à l'écriture et au montage, la photographie de Vittorio Storaro fait preuve d'une belle souplesse. J'entends par là qu'à la fois belle, chaleureuse et très précise dans les jeux d'ombre et de lumière, l'image est toujours d'une excellente facture et corrobore le sentiment que cette production avait d'heureuses et généreuses ambitions. Un très bon film érotique, d'une grande sensualité et très mystérieux, porté par une actrice qui sort de l'ordinaire et ne peut laisser indifférent. Trombi: Angela Luce: Lilla Brignone: Tina Aumont: Pino Caruso: Stefano Amato: Gianluigi Chirizzi: Massimiliano Filoni: